dimanche 14 avril 2013


Halloween et La Toussaint. Publié en octobre-novembre 2011 dans Acadiana Profile.

Il y a quelques années, Steve Riley et les Mamou Playboys ont sorti un album, « La Toussaint ». Dans la chanson du même titre, David Greely chante « Le premier de novembre/ La Toussaint/ On se met tous ensemble/ Mettre des fleurs sur les tombes /Pour se rappeler, honorer nos ancêtres/ Honorer leur travail et leur sagesse». Strictement parlant, c’est le lendemain, la Commémoration des fidèles défunts qu’on rend honneur à nos ancêtres. La Toussaint est plutôt l’occasion d’honorer la vie de tous les saints catholiques. Aujourd’hui c’est le premier novembre, mais pendant longtemps on la célébrait soit autour de Pâques, soit autour de la Pentecôte. Petit à petit, les fêtes religieuses ont remplacé les fêtes païennes et la Toussaint ne fait pas exception. À l’origine, c’était la fête celte, Samain, qui marquait le début de l’année et la fin de la récolte, la transition de la lumière vers les ténèbres et le passage du temps des hostilités entre les tribus au temps des rassemblements et des négociations. Évidemment, ces réunions étaient souvent l’occasion de joyeux festins qui duraient trois jours. Samain avait la particularité d’être ouverte sur l’autre monde et servait de point de contact entre le monde des hommes et celui des dieux, entre les vivants et les morts. Entre les 8è et 9è siècles, cette fête s’est graduellement fixée à la date qu’on connaît aujourd’hui. Toutefois, les trois jours auparavant associés à une seule fête est à présent divisée en trois : Halloween, la Toussaint et la souvent négligée Commémoration des fidèles défunts. Étant donné leur relation étroite, ce n’est pas étonnant qu’on puisse les confondre. Avec notre mode de vie rapide, on n’a peut-être tout simplement pas le temps d’y consacrer trois jours.

En Louisiane, comme tous les bons Américains, nous nous déguisons en vampires, loups-garous et d’autres fantômes et sorcières pour faire de la quémande de porte à porte. Depuis quelques années, ce n’est plus uniquement une fête pour les enfants. De plus en plus d’adultes participent aux festivités pas avec la distribution de bons-bons mais avec quelque chose un peu plus fort. Il est vrai que cette coutume n’est pas sans rappeler le courir du Mardi gras dans les prairies du sud-ouest où la quête d’ingrédients pour le gombo est aussi fortement arrosée. Néanmoins, tout comme le Mercredi des cendres, le lendemain d’Halloween, la Toussaint, est l’occasion de se recueillir et réfléchir sur le sens de la vie et de la mort, de la mortalité et de l’immortalité et comment on passe si vite de l’un à l’autre. Si nos cimetières surélevés, ces cités des morts, émerveillent les étrangers par leur beauté dérangeante, leur tranquillité à toute épreuve et leur affirmation paradoxale de la vie, c’est que nous avons bien compris la phrase de Faulkner, « Le passé n’est pas mort. Il n’est même pas passé ». On n’a qu’à voir avec quel soin, quel amour et quel dévouement les proches des défunts nettoient et blanchissent les tombes, remplacent les couronnes fanées  pour comprendre à quel point nous nous sentons près d’eux. Je me rappelle des visites qu’on faisait derrière l’église Notre Dame de Prompte Secours quand on frottait vigoureusement les pierres tombales. On apportait des bouquets frais aux membres de la famille décédés depuis des années avant ma naissance. On s’arrêtait et priait devant leurs tombes. Il me semblait que les grands parlaient aux défunts plus qu’autre chose. Même si on faisait ces visites assez souvent, celles de la Toussaint avaient un élan distinct par rapport à la veille remplie de déguisements et de revenants, de frayeur et de douceurs.

La Toussaint est tellement important dans notre mentalité que notre chère équipe de football américain, les Saints de la Nouvelle-Orléans, est née le 1er novembre 1966. On a peut-être cru que pendant longtemps les joueurs portaient des costumes plutôt que des uniformes et faisaient semblant d’être des athlètes professionnels, mais depuis notre victoire au Super Bowl, on les porte dans une plus grande estime, plus proche de la sainteté. Il est vrai que pour les vrais supporters, on vit ou on meurt à chaque match.

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