mardi 28 mars 2023

De la Table de cuisine à la table française : Les rendez-vous du français. Publié dans Acadiana Profile, avril-mai 2023.

 De la Table de cuisine à la table française : Les rendez-vous du français

Cinquante ans passés, le recensement américain nous disait que le nombre de Francophones en Louisiane s’élevait à plus d’un million. De nos jours, c’est probablement autour de 200 000, plus ou moins, mais personne ne peut le dire avec certitude. Cette diminution est attribuable en grande partie, comme on le sait, à l’interdiction du français à l’école. La difficulté pour compter celles et ceux qui ont pu, malgré tout, continuer à le pratiquer peut s’expliquer par le fait que des gens qui parlent bien le français ou le créole louisianais sont toujours sous la fausse impression qu’ils ne parlent pas le « bon » français et disent « non » quand on leur pose la question. Il n’empêche que trois générations plus tard, malgré les efforts du CODOFIL et des individus militants, engagés et même enragés des fois, la langue française en Louisiane n’est plus aussi robuste en termes de chiffres absolus. Soit. Le changement radical qu’on a vu depuis ce temps est plutôt celui de l’attitude envers l’expression publique du français. Avant, le français se pratiquer chez soi autour de la table de cuisine pour ainsi dire. Les histoires de Cadiens qui recevaient fréquemment des remontrances, de la part d’autres Francophones louisianais, pour avoir commis le péché mortel de parler français en public, sont nombreuses. Paradoxalement, pendant cette période de déclin, au fur et à mesure que le nombre de Francophones diminuait, le français était de plus en plus acceptable sur la place publique. De nos jours, le français a droit de cité en Louisiane. Si on sait où tendre l’oreille, on entendra charrer le français un peu partout.

 

Le lieu public le plus sûr où vous pouvez aller est à une des nombreuses tables françaises qui pullulent en Acadiana. Selon le site web du CODOFIL qui les a répertoriées, on peut en trouver une quelque part pratiquement tous les jours. De Basile à Raceland, de Marksville à Kaplan et de Eunice à Scott, en passant par Welsh, Thibodaux et Arnaudville, on peut rencontrer des Francophones de tous les niveaux, du débutant qui ne sait dire que « bonjour » jusqu’au monde qui peut lire et écrire en français aussi, tous devant une bonne tasse de café comme il se doit bien sûr. Pour les amateurs de boissons plus fortes, les rencontres peuvent se faire en soirée autour d’une bière fraîche. De Dwyer’s Café de Lafayette toutes les semaines à la Table française de la Maison Valsin Broussard une fois par mois, les occasions de se faire des amis en français ne manquent pas.

 

Dessin de Sara Willia
Au lieu de me faire insulter quand je parle en public, les gens m’expriment leur désappointement de ne pas pouvoir parler en français. Ils formulent des remarques en anglais plutôt du genre « Que tu es chanceux de parler français », « J’aurais tant voulu que mes grands-parents me montrent le français » ou d’une façon qui en dit long, « J’aurais dû écouter mes grands-parents plus ». Alors, venez à table et causez avec nous.