lundi 2 octobre 2017

Les ailes au-dessus de l’Acadiana, publié dans Acadiana Profile, oct-nov 2017

En passant par l’aéroport international de la Nouvelle-Orléans, nommé pour son résident le plus connu, Louis Armstrong, nos visiteurs arrivant en Acadiana sont en droit d’être confus par son code AITA, ces trois lettres qui désignent les aéroports, MSY en l’occurrence. Si les amateurs de trivia louisianais savent que ces initiales représentent Moisant Stock Yards, les parcs à bétails de Moisant, l’identité de ce monsieur reste inconnue pour la plupart. On peut croire qu’il était le propriétaire d’un vaste terrain servant autrefois à entreposer les vaches, mais John Moisant était au fait un des pionniers de l’aviation. Au début du XXe siècle, il a popularisé la montée des « barnstormers », ces acrobates aériens qui captivaient l’imagination du public avec leurs exploits. Il était le premier aviateur à survoler, avec un passager, une ville, Paris, et la Manche et ce en 1910, à peine six ans après le vol des frères Wright. Un peu plus tard cette même année, il s’est tué dans un accident d’avion dans un champ pas loin de l’actuel aéroport qui honore sa mémoire sur les étiquettes de bagage. Il a mis la barre haute pour ceux qui allaient le suivre dans la folle histoire de l’aviation chez nous.

Si on veut approfondir ses connaissances du développement de l’aviation en Acadiana, un arrêt à Patterson dans une bâtisse au nom cocasse, le musée Wedell-Williams de l’aviation et des scieries de cipre, est de rigueur. Il semblerait que la Louisiane ait le chic pour joindre deux choses à première vue étrangères l’une à l’autre, mais ce mélange s’explique facilement. Jimmy Wedell était un jeune homme pressé, amoureux de vitesse. D’abord mécanicien automobile, il a vite appris à construire et à piloter ses propres avions. Il a voulu être pilote pendant la Première Guerre Mondiale, mais on l’a refusé à cause de la perte d’un œil dans un accident de moto. Néanmoins, il a pu acquérir l’expérience nécessaire pour que l’Armée le prenne comme instructeur. Le fait d’être borgne n’était pas une entrave à sa carrière. En 1933, il détenait le record de vitesse en avion avec un vol à plus de 300 miles à l’heure. Il a attiré l’attention du millionnaire Harry P. Williams, dont la famille avait fait fortune dans le pétrole, le sucre et, vous l’avez peut-être deviné, la récolte de cipre. Avec l’expertise de Wedell et l’argent de Williams, ils ont formé le Wedell-Williams Air Service qui connaissait un grand succès. Malheureusement, la tragédie a encore frappé quand ils ont été tués dans des accidents séparés, en 1934 et 1936, mettant fin à cette entreprise.

Récemment les électeurs de Lafayette ont approuvé une taxe temporaire pour financer la construction d’un nouveau terminal à l’aéroport Lafayette Regional, confirmant l’importance ils accordent à l’aviation. Avant la Deuxième Guerre Mondiale, son site actuel était un champ ouvert qui permettait les décollages et atterrissages dans n’importe quelle direction. Pendant la guerre, il servait à former les pilotes du Corps aérien de l’Armée en utilisant des PT19 Fairchild. Un de ces jeunes formateurs était un certain Roger Larrivée. Il n’était pas originaire d’Acadiana, mais il s’est marié avec une Mouton après avoir vu sa photo dans la vitrine d’un studio de photographie. Le couple a vécu un peu partout à cause de sa carrière de pilote. Il a même été le pilote de deux présidents américains, Kennedy et Nixon, sur Air Force One. Une fois la guerre terminée, l’aéroport est retourné à la vie civile et sa transformation vers le présent a commencé.


Lorsqu’on parle de l’aviation à Lafayette, le nom de Paul Fournet est inévitable. Comme Moisant, Wedell et Williams, il a eu un accident d’avion, mais il l’y a survécu. Néanmoins, il n’a plus jamais marché. Comme Wedell et son seul œil, cet obstacle ne l’a pas empêché de fonder sa propre compagnie, dont le logo était un pilote assis dans un fauteuil roulant ailé. Fournet Air Services assurait les opérations de l’aéroport desservant surtout l’industrie pétrolière dans le golfe. À son apogée, il employait 132 personnes. En 2014, une plaque était posée à l’entrée de l’aéroport, désignant l’endroit « Aérodrome Paul-Fournet ». Comme les autres aviateurs qui l’ont précédé, il a surmonté les épreuves pour aller plus haut et plus loin.

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